Élevez vos voix pour lutter contre l'élévation du niveau de la mer.
Parti à Ziguinchor capitale de la Casamance pour faire quelques courses depuis le petit village de Niomoune, je me suis retrouvé dans une manifestation qui affichait ce slogan. Les manifestants souhaitent que leurs concitoyens prennent conscience des problèmes écologiques qui menacent la planète et la Basse Casamance.
Le Sénégal forme un visage qui regarde les rivages des îles du Cap Vert. Dakar en est le nez, la Gambie, pays indépendant enclavé au milieu du Sénégal en est la bouche et la Casamance, le menton à barbe verte de ce visage de géant. C'est un colosse au pied d'argile, car la basse Casamance porte bien son nom par ses nombreuses terres basses, prêtes à être englouties sous la montée des eaux.
Niomoune est un gros village de 2000 habitants situé au nord du fleuve Casamance, sur une île entourée de bras de mer entrecroisés appelés Bolongs. Les Niomounois font partie de l'ethnie des Diolas. Pas de route dans ce paysage d’îles basses et de mangrove ; la pirogue est le seul moyen de transport.
Le village est construit sur des tas de coquillages et de sable probablement formés par l'homme au cours de siècles en ramassant, mangeant puis jetant les coquilles vides. Ces amas coquilliers forment des îles où poussent de grands arbres, entourées de rizières.
Cette année, lors d'une grande marée, l'eau salée du bolong est passée au dessus de la digue, a envahi les rizières les plus basses, et le sel à brûlé les pousses de riz. La brèche a été colmatée par les villageois pour que l'eau de pluie puisse laver les rizières et les rendre à nouveau exploitables l'année prochaine. Mais la récolte de cette année est perdue...
Le coté sud du village est le plus proche de la Casamance et de la mer. Il est donc le plus exposé à l'élévation de son niveau. Depuis plusieurs années, les rizières sont progressivement envahies par l'eau salée, qui atteint aujourd'hui, le bord du village, à quelques mètres des maisons.
Se retrouvant autour d'un kakobot (louche) de vin de palme, les habitants de Niomoune ont décidé de se lancer ensemble, dans la construction d'une digue solide pour reprendre à l'eau salée leurs rizières .On voit ici la préparation de la digue avec des bâtons plantés dans le sol.
La digue est commencée cette année, sous la protection du fétiche : piquet avec des tressages de feuilles à son sommet, qui représente une émanation de Ata Hemit leur Dieu. Car, bien qu' ils soient catholiques, les Diollas restent avant tout animistes.
La technique de construction est simple :
Tout d'abord "le planté de bâton" Les anciens commencent par définir le tracé de la digue, souvent sur les anciennes digues, afin de minimiser le travail. Ils plantent des branches de palétuviers, que les plus jeunes se chargent d' enfoncer à coup de masse en bois.
On relie les bâtons planté par un autre ficelé a l'horizontal, puis on enterre un tressage de bambou (que l'on voit au sol deux photos auparavant), et on recouvre le tout d'un film plastique.
Et ensuite...?
Ensuite on rempli de terre... sur 2 mètres de large et 50 cm de haut soit 1 mètre cube de terre déplacé par mètre de digue
Mais entre les deux photos il y a un long et dur travail réalisé par de nombreux hommes. Avec leur kadiandou , ils "lèvent" la terre lourde et gorgée d'eau pour former la digue. Pour avoir essayé je peux vous dire que c'est très dur et très long Chaque homme prend 2 mètres de digue soit 2 mètres cube de terre déplacée.
Le kadiandou "lance"-pelle de "l'age du fer"
Il est fabriqué en bois au village par le forgeron, avec un fer coupant ajusté au bout. L'ensemble est fragile et doit être manipulé avec une technique particulière. Si l' on s'en sert comme une pelle de maçon, le fer se démonte.
Les hommes durant cette année viendront travailler sur la digue de nombreuses journées, alternant ce travail harassant avec la culture des autres rizières la récolte du riz et les traditions villageoises.
Après 4 heures de travail pour 2 mètres de digue, chacun rentre goûter un repos mérité.
Mais pour combien de temps ?
Combien de fois ces hommes devront-ils relever le niveau de leur digue, pour continuer à cultiver un riz de très haute qualité environnementale sans l'aide de machine et de pétrole.
A cause de notre surconsommation d'énergie, responsable du réchauffement climatique et de l'élévation du niveau de la mer, ces hommes, qui n'en consomment pas, doivent lutter durement pour continuer à pouvoir vivre de la terre.
Pour leur montrer notre solidarité nous pouvons les aider dans ce travail.
Un mètre de digue coûte 5 euros entre l'achat du tressage de bambou, du film plastique, et le travail des hommes.
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